Peur enfantine



J’ai lu un billet de Célestine sur ses peurs enfantines, Souvenirs sous ma frange où elle partage une photo d’elle enfant avec son frère et son chien.

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J’avais à peu près la même coiffure, une frange, un frère et un chien.


Je me suis alors demandée de quoi avais-je peur enfant ? Pas du noir en tout cas, ni des chiens, ni des sorcières, ni des ogres, ni de Barbe-bleue, ni des loups. 


J’avais un peu peur de l’eau mais je l’ai apprivoisée.


Non la seule chose qui me terrorisait vraiment c’était de perdre mes parents, même si ma mère quand elle m’emmenait chez le coiffeur demandait une coupe à la Jeanne d’Arc. 


Notre chien Doumi nous accompagnait partout dans nos jeux d’enfants, il faisait partie de la bande. Il y avait aussi le chien d’un voisin, Duke (prononcer Diouc à l’anglaise) qui avait un oeil crevé et puis Black qui pourtant était blanc, le chien du directeur.


Un jour ma mère m’envoya chez le directeur pour demander des citrons car il y avait dans son jardin un magnifique citronnier plein de fruits et il nous en proposait souvent. 


C’est son épouse qui m’ouvrit lorsque je toquai à la porte de leur belle villa avec mon petit panier. Elle me dit alors d’aller me servir.


J’ai encore dans le nez l’entêtante odeur des citrons gorgés de soleil et de leurs petites fleurs blanches. 


J’en avais rempli mon panier et repartais en sautillant quand soudain Black, le chien qui était blanc, surgit de je ne sais où, aboyant furieusement. Lorsque je vis sa gueule béante tout près de mon visage, je repliai mon bras pour me protéger et ses crocs s’y plantèrent. Je ressentis alors une terrible douleur. Je ne sais plus comment il se décida à me lâcher quand j’arrivai devant notre maison en pleurs et le bras ensanglanté. Ma mère affolée se précipita sur le téléphone qui était fixé au mur, en ligne direct avec mon père. Nous habitions au sein des Entrepôts frigorifiques de Marrakech où il travaillait. Il arriva rapidement pendant que ma mère me désinfectait les plaies avec de la teinture d’iode.


C’était un dimanche, donc pas de médecin. Mon père alla chez le directeur pour demander si le chien était vacciné contre la rage. Son épouse répondit qu’elle n’en savait rien et qu’il fallait attendre le retour de son mari en déplacement pour trois jours. A l’époque, il n’était pas aussi facile de communiquer qu’aujourd'hui.


Ma grande soeur, qui ne faisait pas dans la dentelle, me dit tu vas attraper la rage. 

Elle ajouta il faudra te faire trente piqures dans le ventre. Je ne sais pas d’où elle sortait ça mais cette idée m’horrifiait. 


Mon frère dit si tu attrapes la rage tu vas baver. Ça, je le savais et que j’allais mourir après.


Je n’en ai pas dormi de la nuit.


C’était un temps où beaucoup de chiens errants et de chacals traînaient dans les alentours et pouvaient transmettre la maladie. 


Heureusement, on n’eut pas à attendre trois jours pour avoir la réponse. Le lendemain, le directeur appela son épouse et on sut que le chien était vacciné. 


On m’emmena chez le médecin. Les trous que les crocs avaient laissés dans mon bras ne nécessitaient pas de points ce qui me soulagea. 


J’ai longtemps gardé les cicatrices. Elles ont aujourd’hui complètement disparu.





 

Je suis la petite grignette devant le groupe avec cette horrible coupe de cheveux.
A droite c'est le chien Duke. Je n'ai pas trouvé de photo de Doumi ni de Black. 






Commentaires

  1. Ton récit me laisse plus avec le sentiment que tu as eu peur de perdre ta vie plus que celle de perdre tes parents…
    Et il y avait de quoi avoir peur face à cette éventualité surtout que les frères et sœurs inquiets ajoutaient leur propre angoisse d'une rage dévastatrice…
    La « petite grignette » comme tu dis étais bien trop mignonne pour s'en aller si vite !

    Même s'il est tragique sur l'instant, j'ai beaucoup aimé la manière dont tu relates cet épisode, suscitant notre émotion rétrospective, et en même temps se réjouissant qu'il n'en reste plus trace physiquement, si ce n'est dans ta mémoire, mais semble avoir pris la place qui convient.

    (Ah oui ! : La coupe « à la Jeanne d'Arc » ! Je me souviens de cette expression lointaine, qui plus tard fut remplacé par : « la coupe à la Mireille Mathieu » !)

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  2. C'est drôle comme une lecture réveille un souvenir enfoui. En le racontant j'ai revécu l'angoisse de l'incertitude qui m'avait étreint. Quant à la coupe de cheveux à la Jeanne d'Arc, heureusement qu'à l'époque je ne réalisais pas trop le massacre que le coiffeur faisait. Dès que je n'ai plus été une petite grignette, je me suis rebellée.

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  3. Les peurs d'enfant... J'en aurais tant à raconter moi aussi. Par contre, pas à cause des chiens, même si un jour, alors que j'étais invitée pour l'anniversaire d'une petite copine, je devais avoir 10 ans peut-être, alors qu'on jouait à cache-cache, j'ai eu le malheur de vouloir me cacher dans le garage, mais aussitôt le battant ouvert, un chien-loup a surgi, me faisant tomber et pleurer, mais heureusement, trop content de retrouver la liberté, il ne s'est pas intéressé à la petite fille que j'étais. N'empêche, quelle peur j'ai eue !
    A propos de coupe à la "Jeanne d'Arc", j'y suis passée moi aussi, il faudra que je recherche la photo.
    Bonne fin de journée, Myrte. Merci pour ce partage, et la jolie photo. :-)

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    1. En effet un chien-loup qui surgit doit être effrayant pour une fillette. J'ai hâte de voir ta photo avec la coupe à la Jeanne d'Arc ! Nous allons faire une collection !

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  4. La grosse frange était notre lot commun à l'époque. On se ressemblait toutes je crois.
    Les peurs d'enfant ? Curieusement, je ne me souviens que de la terreur que j'éprouvais pour les grosses araignées (en tout cas grosses dans mon souvenir), spécialement dans la "baraque noire" de mon grand-père, et dans la baignoire installée près de la buanderie.

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    1. Ah oui les araignée ! J'ai très peur des grosses araignées et, enfant j'avais aussi très peur des scorpions, mais je considère que ce ne sont pas des peurs enfantines puisque j'en ai toujours peur.

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  5. Je ne me souviens pas d'avoir ou d'avoir eu des peurs surgies de l'enfance ? Enfin si, maintenant que j'y pense. Petit, j'avais voulu attraper à pleine main une vipère, je ne savais pas ce que c'était. Mon grand frère avait surgit, armé d'un râteau (nous faisions les foins) et l'avait prestement trucidée. Depuis, j'en avais gardé une phobie. Phobie que j'ai dû apprivoiser, par la force des choses, pour prévenir mes enfants, alors qu'ils étaient petits et qu'ils furent confrontés aux mêmes problèmes. j'en ai moins peur, mais je n'aime pas pour autant.
    Puis il y en a une autre de peur, pas vraiment une peur d'ailleurs, mais plutôt une grande méfiance.
    Alors que j'étais encore petit, je ne me souviens pas de l'âge que j'avais, j'avais été "coursé" (poursuivi) pas un taureau, en plein hiver. Comme personne n'avait l'eau courante chez soi, les vaches et taureaux, quand ils y en avaient, étaient abreuvés en extérieur, aux bacs communaux. Au retour du troupeau, un taureau (charolais) avait senti ma présence et me chassait comme un intrus dans son cheptel. Mes petites jambes m'avaient porté à me réfugier dans une soue pour les cochons, vide de ses occupants. La porte était trop étroite pour un bovin de cette taille, il ne pouvait entrer. J'en avais gardé une peur bleue. Maintenant que je suis grand, enfin plus âgé, je me méfis de ces bêtes-là. Ils ont la capacité d'évaluer la testostérone ambiante, et de la considérer comme rivale. Il n'est pas rare que des paysans se fassent purement et simplement tuer par leur taureau. Chez mon voisin du Cantal, il fut un temps où seule sa femme pouvait s'approcher de ce monstre de muscle et en faire (presque) ce qu'elle voulait. Ces bestioles-là, savent reconnaître la présence, même lointaine, d'un homme ou d'une femme. Je sais par expérience qu'il faut faire très attention. Je n'en ai pas vraiment peur, mais je ne me risquerais pas à trop m'approcher.

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    1. Les serpents je n'aime pas trop non plus mais , conne je le dis plus haut à Nikole, j'en ai toujours peur. Pour moi, les peurs enfantines sont plutôt celles qu'on imaginait. C'est intéressant ce que tu dis sur les taureaux. Ça ne m'étonne pas qu'ils reconnaissent le sexe des personnes. Je crois que c'est aussi le cas pour les autres animaux non ? Chez le taureau ça doit être exacerbé parce qu'ils ont été conçus pour la reproduction.

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  6. Ravie de t'avoir inspiré ce beau billet. C'est amusant ces similitudes.
    C'est amusant aussi de lire les commentaires de nos amis communs, qui racontent chez toi des anecdotes qu'ils n'ont pas évoquées chez moi ;-)
    Notre coupe de cheveux n'était pas si horrible, quoi qu'on en pense. En tout cas, je n'ai jamais su me défaire de ma frange, même avec les cheveux longs...
    •.¸¸.•*`*•.¸¸☆

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    1. Moi aussi j'ai gardé la frange longtemps mais elle était quand même plus longue que ce que l'on voit sur la photo.

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